Histoires de jeux

« Ah, t’es là mimine, je te cherchais.
– Il suffisait de suivre le son du métal.
– Oui et que ça m’inquiète, tu t’en fous, toi ?
– Qu’est-ce que tu veux que je risque à les regarder d’aussi loin… Surtout qu’on ne les intéresse que quand ils veulent nous faire passer à la casserole.
– Quand même c’est pas prudent… Et puis les autres trouvent ça… bizarre… ta passion.
– Parce qu’aucun d’eux n’a essayé. Viens, pose-toi à côté de moi et regarde-les, c’est fascinant.
– Et je dois voir quoi ?
– La bêtise humanoïde.
– La… La quoi ?
– Regarde-les se sentir tellement supérieurs, si fiers de leur musculature, de leur intelligence alors qu’ils sont tous plus bêtes les uns que les autres, que leurs existences ne se résument qu’à quelques milliers d’années… tout au plus.
– Je le sais bien tout ça, mais ça rime à quoi ? Allez, laisse tomber ! Pourquoi s’intéresser à eux ? Viens Mimine, j’ai préparé une petite salade de fourmis.
– Reste avec moi, regarde ce qui s’amène là-bas.
– … Euh… C’est quoi ce truc ?
– Je pourrais me tromper, mais je dirais que c’est un poulpe dans un tonneau posé sur le dos d’un crabe.
– Ben ok, mais c’est quoi ?
– Oulà ! Moi si je reste là, c’est pour m’amuser de leur bétise, mais absolument pas pour chercher à la comprendre. »

[…]

« Tu vois que ça commence à t’intéresser.
– Pourquoi tu dis ça ?
– Ben… T’es restée à mes côtés, à les regarder.
– J’ai toujours pas compris ce qu’on regarde, mais surtout, ce qu’ils foutent.
– Prépare-toi parce que ça va te paraître absurde.
– Vas-y, dis-moi tout.
– Sur notre archipel, il y a une vingtaine de ponts qui relient les îles.
– Oui… bla bla bla et avec le dérèglement climatique, la montée des eaux, notre territoire grandit et le leur se réduit. Même les tétards savent ça.
– Oui, mais justement, au lieu de se mettre d’accord et de trouver des solutions pour vivre ensemble et pourquoi pas arrêter la montée des eaux… Ben ils se battent.
– Mais pourquoi ?
– Ben pour être les seuls à avoir une île.
– Et la plupart savent que si on regarde les statistiques, ils vont mourir ?
– La plupart ne savent pas compter leurs pieds.
– Ah ouais quand même.
– Non mais je crois que c’est dans leur nature.
– La violence pour la violence ?
– Non, le fait d’être complètement débiles.
– Bon ok, c’est rigolo, mais de là à passer tout ton temps là…
– Attends c’est pas fini. Ils ont tous de grosses armées, ils pourraient se faire des grosses bastons sur la terre ferme ? Ben non, ils s’affrontent sur les ponts.
– C’est complètement con.
– … Par groupe de huit.
– Hein ? Mais pourquoi huit ?
– Ça, j’avoue, j’ai toujours pas compris.
– Mais…
– Attends, mieux ! Ils respectent scrupuleusement la règle des huit. Sans rire, leur but, c’est d’être les derniers à avoir une île – qui coulera comme les autres, on va pas se mentir –, mais ils sont trop bêtes pour se dire que juste une fois, ils pourraient envoyer neuf guerriers au lieu de huit pour je sais pas moi… avoir un avantage numérique.
– Ah ouais, quand même. Bon je commence à comprendre pourquoi ils t’intéressent tant.
– Des génies, je te dis. Quoique… L’autre jour, l’un d’eux a dit un truc qui sortait du lot : “Deux choses sont infinies, l’Univers et la bêtise humaine, mais en ce qui concerne l’Univers, on n’en a pas encore la certitude absolue”.
– Ah pas mal.
– Oui. Bon après le gars est tombé raide mort, en se tenant la tête, il avait dû trop réfléchir pour son espèce.
– Bon, ok Mimine, t’as raison, c’est fun. Mais quand même, on retourne voir les petits et casser la graine ?
– Mais non voyons, ils se débrouilleront. C’est la sélection naturelle et puis regarde, on a les casse-croûtes à volonté ici… slurp… Hmm, j’adore le croquant des libellules, pas toi ? »